Chronique de juin 2024 – L’arbre qui cache la forêt

La nature s’est doucement revêtue de ses plus beaux habits, les arbres qui avaient perdu leurs feuilles semblent revivre. L’expression qui coiffe cette chronique trouve son fondement dans l’observation concrète de la nature, et il n’est pas faux de dire que lorsqu’on est très proche d’un arbre, il est difficile de voir le reste de la forêt. L’arbre qui cache la forêt, en son sens métaphorique, illustre que lorsqu’on fixe son attention sur un détail précis, on ne peut prendre la mesure objective de la situation dans sa globalité, que fixer un détail se fait au détriment de l’ensemble. On recourt à cette expression pour dépeindre un contexte où un aspect isolé dissimule une réalité plus complexe…pour dépeindre une vision altérée, confuse ou restreinte d’une situation.

En violences conjugales masculines, l’arbre qui cache la forêt, c’est qu’on ne dispose d’aucune donnée rendant possible l’appréciation de l’efficacité des programmes d’aide aux conjoints violents, qu’aucune norme n’encadre ces programmes, alors que la Cour y réfère certains conjoints.

L’arbre qui cache la forêt c’est que les programmes pour conjoints auteurs de violences sont habituellement évalués sur la base de ce qu’en disent les hommes qui les ont suivis ou sur des éléments présumés être impartiaux, comme la récidivité. Toutefois, pour reprendre les propos de la professeure et chercheuse de l’École de service social de l’Université Laurentienne, Isabelle Côté, « la récidive n’est pas un très bon indicateur en matière de violence conjugale : d’abord parce que beaucoup de femmes ne dénoncent pas leur conjoint… pour que la récidive soit notée dans un rapport de police, il faut que des infractions criminelles, comme des coups de poing, aient été commises. Le fait qu’il n’y ait pas eu de rapport de police ou que la violence exercée soit plutôt du contrôle coercitif ne permet pas de conclure à la cessation des comportements violents ».

L’arbre qui cache la forêt, c’est que la participation d’un conjoint violent aux programmes offerts dans un groupe pour hommes suscite un espoir démesuré de changement chez la femme violentée. L’arbre qui cache la forêt, c’est que certains de ces groupes recourent à des pratiques proscrites, comme d’inviter la femme à une rencontre de couple. Dans ce contexte, l’impartialité est illusoire, certaines femmes rapportent avoir été fortement encouragées à mettre de l’eau dans leur vin, à comprendre la « détresse » du conjoint… occultant du coup les sévices qu’elle subit et la responsabilité de l’agresseur quant aux violences exercées. L’arbre qui cache la forêt, c’est cette tentative de confondre violences et détresse.

Pour y voir plus clair… La chercheuse a recueilli les témoignages de femmes dont le conjoint a suivi un programme dédié aux auteurs de violences, une première initiative de cette nature menée au Québec. Les résultats n’ont rien de rassurant! Une seule des 9 femmes participant à l’étude a rapporté des changements positifs s’étant maintenus dans le temps; 3 d’entre elles ont souligné des changements éphémères; 5 ont révélé l’absence de changement, voire l’intensification des violences. (Pour l’article complet https://www.ledevoir.com/societe/812912/programmes-intervention-aupres-hommes-violents-evalues-conjointe)

Madame, si votre conjoint s’inscrit à une thérapie, demeurez vigilante. S’il vous convie à une rencontre de couple, refusez-la! Il y a une maison d’aide et d’hébergement près de chez vous. Une intervenante pourra vous aider à faire le point, que vous ayez ou non recours à l’hébergement. Pour de l’information, pour de l’aide ou pour de l’hébergement : 1 800 363-9010, 24 h/24, 7 jours/7.

Monic Caron, pour L’Alliance GÎM

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https://www.linternaute.fr/expression/langue-francaise/171/c-est-l-arbre-qui-cache-la-foret/ (consulté le 26 mai 2024)

https://expressions.modele-lettre-gratuit.com/l–arbre-qui-cache-la-foret.html (consulté le 26 mai 2024)

https://www.ledevoir.com/societe/812912/programmes-intervention-aupres-hommes-violents-evalues-conjointes (consulté le 28 mai 2024)

https://www.ledevoir.com/societe/790991/hommes-en-detresse-soigner-les-hommes-violents (consulté le 30 mai 2024)